Quelques réflexions sur la déchéance de nationalité d’Erich
Cohn-Bendit : analyse de ses conséquences dans des circonstances internationales particulières (1939-1945)
Classement : apatridie ; Allemagne nazie
Ceci est une suite des pages consacrées à la déchéance de nationalité d'Erich Cohn-Bendit dans laquelle
j’étudie les sources disponibles, d'abord une traduction de son
acte de déchéance (qui date du 14 février 1939), que Gabriel Cohn-Bendit
affirme détenir, puis une version officielle (en allemand).
Un certain nombre de problèmes se posent, notamment parce
qu’il faut tenir compte des circonstances internationales, très variables dans
les années suivantes :
*Quand est-ce que cette traduction est arrivée entre les
mains de la famille Cohn-Bendit ?
*Quand est-ce qu’Erich Cohn-Bendit a été informé de sa
déchéance de nationalité ? *Quelles conséquences concrètes cette déchéance
a-t-elle eues ?
Le cheminement du document
Dans la version allemande de l'acte, il est indiqué que le ministre de l'Intérieur (Frick) agit en accord avec le ministre des Affaires étrangères (Ribbentrop). Il est donc probable que les déchéances, qui concernent des exilés, étaient transmises aux Affaires étrangères.
En février 1939, la France et l’Allemagne
n’ont pas rompu leurs relations diplomatiques ; on peut imaginer que le
ministère allemand des Affaires étrangères transmettait les listes de déchus aux ambassades des pays d'accueil, dont l’ambassade de France. Ces documents pouvaient être traduits par l’ambassade, transmis au ministère français des Affaires étrangères, de là au ministère français de l’Intérieur, puis
acheminés jusqu’aux intéressés par les autorités préfectorales. Toutefois, il n'est pas évident que les autorités françaises se soient chargées de ce travail, qui n'avait d'intérêt que pour les autorités allemandes (nazies).
Le fait qu’il y ait une traduction française semble
attester que l’acte de déchéance est venu à la connaissance d’une autorité
française ; cela ne pourrait avoir eu lieu qu’entre février et août 1939,
la guerre venant interrompre les relations diplomatiques.
On peut aussi supposer que les autorités allemandes étaient au courant du pays de résidence de certains exilés ; mais est-ce que cette connaissance avait une valeur aux yeux des autorités françaises, au point de les amener à notifier leur déchéance aux intéressés.
La situation d’Erich Cohn-Bendit à partir de février 1939
Remarque : avant février 1939, Erich Cohn-Bendit est
considéré en France comme Allemand réfugié politique, donc comme « réfugié
allemand » ; en Allemagne, comme « Juif allemand ayant quitté
l’Allemagne » (je laisse de côté les circonstances du départ qui a eu lieu
en 1933, départ qui est d’ailleurs le motif de la déchéance de nationalité).
1) du 2 février au 3 septembre 1939 (date de l'entrée en guerre de la France)
Du point de vue des autorités allemandes, Erich
Cohn-Bendit n’est plus allemand ; concrètement, cela signifie qu’il ne
pourrait pas obtenir le renouvellement de son passeport allemand, s’il en
détenait un, et s’il devait le faire renouveler. Par ailleurs, les autorités
allemandes ne peuvent rien contre lui (légalement) puisqu’il réside à
l’étranger.
Du point de vue des autorités françaises, si elles étaient
au courant, il serait devenu « réfugié apatride ». Mais cela me
semble peu probable, étant donné le court délai (6 mois) avant le début de la guerre et
aussi étant donné ce qui se passera après l’entrée en guerre. Il est donc peu
probable qu’Erich Cohn-Bendit ait été mis au courant de sa déchéance de
nationalité avant l’entrée en guerre de la France.
Cela implique que même si les autorités diplomatiques françaises ont eu connaissance de l’avis de déchéance, elles ne l’ont pas
transmis aux autorités de l’Intérieur avant le début de la guerre, et qu’Erich
Cohn-Bendit a par conséquent continué d’être considéré comme « réfugié allemand ».
2) du 3 septembre 1939 au 22 juin 1940 (date de l'armistice)
Suite à l’entrée en guerre de la France (3 septembre), Erich
Cohn-Bendit est, comme les autres réfugiés allemands, interné comme
« ressortissant d’un pays ennemi ».
Il me semble que si Erich Cohn-Bendit avait su qu’il était
déchu, il s’en serait servi pour au moins essayer de prouver qu’il n’était plus
allemand (aucun écho de telle tentative ne semble perceptible).
Par ailleurs, peut-on imaginer que tout en le sachant déchu
de la nationalité allemande, donc apatride, les autorités françaises l’aient tout de même considéré comme internable en tant que ressortissant
allemand ?
Je pense donc qu’au début de la guerre, il était toujours considéré comme « réfugié allemand » par les autorités françaises (et
par lui-même) – à moins que la preuve du contraire soit apportée.
3) du 22 juin 1939 à août 1944 (date de la libération du
Tarn-et-Garonne)
Ce point sera examiné ultérieurement.
4) D’août 1944 au 8 mai 1945 (date de la capitulation
allemande)
Ce point sera examiné ultérieurement.
5) Du 8 mai 1945 au retour en Allemagne d’Erich Cohn-Bendit
(1951 ou 1952)
Ce point sera examiné ultérieurement.
A son retour en Allemagne, Erich Cohn-Bendit a fait enregistrer son retour par les autorités de la RFA et bénéficié ainsi de l'article 116-2 de la Constitution de 1949, qui le rétablit dans la nationalité qui lui avait été retirée en 1939.
Création : 18 janvier 2016
Mise à jour : 30 janvier 2016
Révision : 6 septembre 2017
Lien : http://jrichardterritoires.blogspot.fr/2016/01/erich-cohn-bendit-2-analyse_18.html
Auteur
: Jacques Richard
Blog :
Territoires
Page : 55. La déchéance de nationalité d'Erich Cohn-Bendit : les conséquences
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