vendredi 25 décembre 2015

51. Le droit du sol dans le Code civil de 1804 et la loi de 1889

Quelques réflexions sur l’article 9 du Code civil français de 1804 et sur la loi du 26 juin 1889 : « droit du sol » et « obligation du sol »


Classement : droit ; France ; nationalité




Un des lieux communs de la pensée médiatique sur la question « "droit du sang" versus "droit du sol" » est que le droit du sol n’est apparu qu’à une date récente dans le droit français. Une tendance (voir par exemple ce qu'écrit le professeur de droit Emmanuel Langavant) est de dater cette irruption de 1945 (« l’ordonnance de 1945 »), alors qu’elle a eu lieu dès la fin du XIXème siècle, sous la IIIème République (loi du 26 juin1889).

Le Code civil de 1804
Mais en réalité, le « droit du sol » existait, de façon plus discrète, dans le Code civil de 1804, dont l’article 9 indiquait :
« Tout individu né en France d’un étranger, pourra, dans l’année qui suivra l’époque de sa majorité, réclamer la qualité de Français : pourvu que, dans le cas où il résiderait en France, il déclare que son intention est d’y fixer son domicile ; et que, dans le cas où il résiderait en pays étranger, il fasse sa soumission de fixer en France son domicile, et qu’il l’y établisse dans l’année à compter de l’acte de soumission. »
Cet article permettait donc à un quidam né en France d’un père étranger d’obtenir la nationalité française à sa majorité. La seule condition était de s’installer en France (dans un délai d’un an après la demande) ; en ce qui concerne la période antérieure, aucune autre condition que la « naissance en France » n’était exigée.
Cette possibilité a été utilisée par Emile Zola, né à Paris en 1840, d’un père vénitien, en 1861.

La loi du 26 juin 1889
De 1804 à 1889, le « droit du sol », tel qu’il existait dans le Code civil, donnait  le droit à un étranger né en France de devenir français à sa majorité. 
La loi de 1889 change peu de choses pour les personnes nées en France d’un père étranger né à l’étranger : elles deviennent françaises à leur majorité, mais ont le droit de renoncer à cette nationalité (auparavant, elles restaient étrangères par défaut, mais pouvaient devenir françaises sur demande ; désormais, elles deviennent françaises par défaut, mais peuvent rester étrangères sur demande). 
Le changement essentiel concerne les personnes nées en France d’un père étranger né en France : la nationalité française leur est imposée sans recours.

« Droit du sol » et « obligation du sol »
Dans ce dernier cas, le « droit du sol » est un droit pour l’Etat français : en conséquence de la nationalité, c’est le service militaire, désormais universel, qui est imposé ; ce n'en est pas un pour les intéressés, qui n’ont plus le choix (cela dit sans tenir compte de la question de la légitimité de cette décision). On devrait plutôt appeler cela « obligation du sol ».

On pourrait dire que le « droit du sol » existait dans le Code civil de 1804, tandis que la loi de 1889 réintroduit l’ « obligation du sol », qui existait de façon assez générale sous l'Ancien Régime. 



Création : 25 décembre 2015
Mise à jour :
Révision : 6 septembre 2017
Auteur : Jacques Richard
Blog : Territoires
Page : 51. Le droit du sol dans le Code civil de 1804 et la loi de 1889
Lien : http://jrichardterritoires.blogspot.fr/2015/12/le-droit-du-sol-dans-le-code-civil-de.html








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