jeudi 14 décembre 2017

67. Les limites de Saint-Sébastien-sur-Loire (Loire-Atlantique)

Quelques remarques à propos de la limite entre Saint-Sébastien-sur-Loire et Nantes


Classement : géographie locale ; Loire-Atlantique




Saint-Sébastien-sur-Loire est une commune située immédiatement au sud-est de Nantes.
La détermination de la limite entre Nantes et Saint-Sébastien (la dénomination actuelle étant très postérieure), en 1790, a donné lieu à un débat qui s’est terminé au profit de Nantes.

Bibliographie
*Robert Durand, Didier Guyvarc’h, François Macé et l’association « Les Amis de Saint-Sébastien », Du village à la cité-jardin Saint-Sébastien-sur-Loire depuis ses origines, Saint-Sébastien-sur-Loire, ACL Editions, 1986, pages 92-94
[Robert Durand était alors professeur d’histoire à l’université de Nantes]

Présentation géographique
Si on se réfère à un lieu important à l’époque dans la géographie locale, le pont de Pirmil, l’église de la paroisse de Saint-Sébastien se trouvait (comme maintenant) à une distance de 3 km à l’est ; plus près du pont, à environ 500 m au sud-est, sur la route menant à Clisson, se trouvait l’église Saint-Jacques, liée à l’hospice des pèlerins (devenu hôpital).
Au moment de la création du système communal (loi du 14 décembre 1789), l’église Saint-Jacques dépendait (« succursale ») de la paroisse de Saint-Sébastien, qui s’étendait donc jusqu’à la rivière Sèvre (quartiers de Pirmil et Dos d’Âne) et sur une partie des îles situées au nord du pont de Pirmil (quartier de Vertais).

Le conflit de 1790
La loi de 1789 ayant pris les territoires paroissiaux comme référence pour délimiter les communes, les habitants de Saint-Sébastien pensaient que le territoire inclurait celui de la paroisse Saint-Jacques.
Cependant, les villes, qui avaient une tradition municipale ancienne, regroupaient plusieurs paroisses et les communes créées dans les grandes villes comprendraient plusieurs paroisses. En ce qui concerne Nantes, le territoire de Saint-Jacques était important, puisqu’il incluait le pont de Pirmil et ses accès (route de Clisson/Poitiers, route de Montaigu/La Rochelle, notamment). De plus, il existait un système défensif autour du pont, entretenu par la municipalité de Nantes.
Celle-ci a immédiatement considéré le territoire de Saint-Jacques comme nantais. En ce qui concerne les habitants de ce quartier, les élections municipales du 23 mars 1790 montrent que les électeurs (censitaires) ne veulent pas se lier à la population rurale de Saint-Sébastien.
La municipalité de Saint-Sébastien fait appel (4 juillet 1790) devant les autorités du district (arrondissement) de Nantes, qui lui donnent tort.
Il n’y a pas eu d’autre appel, donc depuis juillet 1790, Nantes comporte une excroissance au sud de la Loire (actuel quartier « Nantes-Sud »), séparant Saint-Sébastien à l’est de Rezé à l’ouest (noter que le territoire de Nantes inclut aussi le pont sur la Sèvre, « Pont Rousseau », sur la route de La Rochelle, à 300 m du pont de Pirmil).
Cependant, la paroisse Saint-Jacques reste succursale de Saint-Sébastien pendant une dizaine d’années ; elle n’est devenue une paroisse autonome que lors du Concordat de 1801.
Par la suite, pendant les guerres de Vendée, Saint-Sébastien sera acquise aux insurgés (les républicains s’étant réfugiés à Nantes), fournissant un des officiers notables de l’ACR, François Lyrot de la Patouillère (1732-1793).

Une « rumeur urbaine »
Il y a quelques années, dans Wikipédia, régnait l’idée que c’est le Concordat de 1801 qui avait détaché le territoire de Saint-Jacques de celui de Saint-Sébastien.
Mais il s’agissait d’une confusion entre les domaines de l’administration de l’Etat et de l’administration de l’Eglise, fondée sur une méconnaissance de l’histoire locale.

Un lieu commun local
Il y a aussi des gens pour exprimer (de façon mi-sérieuse, mi-plaisante) l’idée que « autrefois Saint-Jacques faisait partie de Saint-Sébastien » et pour imaginer un « grand Saint-Sébastien » que Nantes aurait injustement empêché.
Cette idée repose sur une autre confusion : le fait que la paroisse Saint-Jacques fût succursale de celle de Saint-Sébastien ne signifie nullement que son territoire relevât ou fît partie de celui de Saint-Sébastien ! En fait à cette époque, les délimitations administratives n’étaient pas homogènes (sans même tenir compte des seigneuries qui ont existé jusqu’au 4 août 1789).
Notamment, la municipalité de Nantes avait des pouvoirs, responsabilités et compétences sur des points précis (par exemple les fortifications du pont de Pirmil) indépendamment des autres pouvoirs qu’elle avait ou n’avait pas sur le territoire de la paroisse Saint-Jacques. En revanche « Saint-Sébastien » (qui n’était qu’une paroisse), n’avait aucun pouvoir de ce type sur le territoire de Saint-Jacques.

Que serait-il arrivé si Saint-Sébastien avait conservé Saint-Jacques ?
Pour le savoir, il faut considérer l’histoire de l’ancienne commune de Doulon, située face à Saint-Sébastien, au nord de la Loire. Lors de la création des communes, le centre était située dans le quartier aujourd'hui appelé « Vieux-Doulon » ; son territoire s’étendait jusqu’au secteur actuel de la gare SNCF. Or au cours du XIXème siècle, ces quartiers limitrophes de Nantes se sont fortement développés (un nouveau centre apparaissant à Toutes-Aides vers 1860), tandis que l’ancien centre restait un bourg rural (jusque dans les années 1960). Cette évolution est à l’origine de l’annexion de Doulon par Nantes en 1905.
Cette année-là, Nantes a aussi annexé Chantenay, à l’ouest.

Conclusion
Si la commune de Saint-Sébastien avait conservé le territoire de la paroisse Saint-Jacques, elle aurait probablement été annexée par Nantes en 1905, comme l’ont été les communes de Doulon et de Chantenay.



Création : 14 décembre 2017
Mise à jour :
Révision :
Auteur : Jacques Richard
Blog : Territoires
Page : 67. Les limites de Saint-Sébastien-sur-Loire (Loire-Atlantique)
Lien : http://jrichardterritoires.blogspot.fr/2017/12/les-limites-de-saint-sebastien-sur_14.html








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